= Extrait du texte sur Max Ernst :
..." Mes vagabondages, mes inquiétudes, mes impatiences, mes doutes, mes croyances, mes hallucinations, mes amours, mes rages, mes révoltes, mes contradictions, mes refus de me soumettre à une discipline, fût-elle la mienne, les visites sporadiques de perturbation, ma sœur, la femme 100 têtes n’ont pu créer un climat favorable à l’élaboration d’une œuvre calme et sereine. Comme mon comportement, elle n’est pas harmonieuse, dans le sens des compositeurs classiques. Séditieuse, inégale, contradictoire, elle est inacceptable pour les spécialistes de l’art, de la culture, du comportement, de la logique, de la morale. Elle a en revanche le don d’enchanter mes complices : les poètes, les pataphysiciens, quelques analphabètes.»
Ces lignes que l’artiste a lui-même rédigées pour le film réalisé par Peter Schamoni en 1963 en disent long du regard que portait Max Ernst sur son œuvre. Elles pourraient mettre un terme définitif à toute tentative d’en cerner le pourquoi et le comment mais la démarche de l’artiste a cette qualité supérieure d’être généreuse, une forme de don en direction de l’Autre, pour qu’il s’y plonge, s’y abandonne et invente sa propre histoire. « Le don d’enchanter mes complices », note Ernst. S’il est un mot le plus approprié à qualifier ce qui fonde la spécificité de son œuvre, c’est bien celui de fabuleux. Pour ce que la fable est un mode né du besoin naturel qu’éprouve l’esprit humain de s’exprimer à l’aide d’images et pour ce que le fabuleux sous-tend l’idée d’un enchantement, voire d’un ré-enchantement qui l’assure de possibles sans cesse renouvelés..."